Atos se donne trois mois pour quitter sa bouée de sauvetage
Le tribunal de commerce a validé jeudi le plan de sauvegarde accélérée d’Atos, fleuron français de l’informatique en grandes difficultés financières depuis plusieurs mois. Après cette décision, le groupe se donne trois mois pour se restructurer et se remettre sur pied. Faute de quoi, il pourrait survenir un deuxième plan de sauvegarde.
Le tribunal de commerce de Nanterre a validé, ce jeudi 24 octobre, le plan de sauvegarde accélérée d’Atos, leader français de l’informatique et de la cybersécurité embourbé dans une profonde crise financière depuis plusieurs mois. Ce plan était porté par les créanciers, qui vont devenir les actionnaires principaux.
Les créanciers d’Atos désormais aux commandes
Ces créanciers obligataires et les banques ont proposé de sauver eux-mêmes le groupe tricolore, après le désistement du conglomérat Onepoint. Ils détiendront désormais entre 74% et plus de 99% du capital de la firme, grâce à la conversion d’environ 2,9 milliards d’euros de dettes financières détenues. Cette prise de participation se fera en fonction des résultats d’une future hausse de capital de 233 millions d’euros, pour laquelle les actionnaires existants ont la priorité.
Atos déclare un CA de 2,3 milliards d’euros au T3 2024
La décision du tribunal de commerce de Nanterre est tombée quelques minutes après qu’Atos a publié son chiffre d’affaires du troisième trimestre 2024. Le groupe informatique a fait part d’un CA de 2,3 milliards d’euros, en baisse organique de -4,4%, mais en ligne avec le plan d’affaires communiqué le 2 septembre 2024. Cette mauvaise performance concerne aussi bien le pôle cybersécurité et big data (-9% à 1,1 milliard d’euros) que la branche infogérance (-11,7% à 1,2 milliard d’euros).
Un désendettement largement suffisant ?
Atos a également annoncé une position de trésorerie de 1,1 milliards d’euros au 30 septembre 2024, ainsi qu’un endettement net de 4,6 milliards d’euros. Celui-ci inclue la réduction de l’optimisation du besoin en fonds de roulement par rapport à fin décembre 2023. L’entreprise assure que son « désendettement est largement suffisant » en considérant son objectif de dix milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2024. Si elle dit vrai, l’enjeu résiderait désormais dans le relèvement de son activité.
Philippe Salle choisi pour mener le redressement industriel d’Atos
Jean Pierre Mustier, Directeur Général d’Atos, est plutôt confiant sur ce point. Il a la foi que sous la direction de Philippe Salle, Président et Directeur Général à partir du 1er février, le groupe réalisera sa restructuration financière et opérera sa nouvelle gouvernance pour atteindre le redressement industriel ainsi que la croissance dans un délai de trois mois. « Il est la meilleure personne pour mener à bien notre transformation et restaurer la confiance en Atos », a-t-il dit.
Le DG actuel s’attend à une activité commerciale plus forte dans les mois à venir
Jean Pierre Mustier affirme avoir déjà constaté un changement de perception positif chez les clients, « qui ont pris note de la restructuration », et qui « cherchent à reprendre une interaction normalisée » avec Atos. Le DG s’attend à une activité commerciale plus forte dans les mois à venir, avec le retour anticipé de contrats stratégiques pluriannuels grâce aux clients existants. Mais les salariés (82.000) s’interrogent sur le niveau d’activité et d’enregistrement de commandes pour les prochains trimestres.
Mais de gros contrats perdus récemment
Alia Iassamen, la coordinatrice CFDT du groupe, rappelle qu’Atos a communiqué récemment sur des pertes de clients. Il a évoqué des résiliations et des reports dans l’attribution de nouveaux contrats. On note par exemple que la société a perdu l’énorme contrat des Jeux olympiques, dont il était le pilier technologique depuis le début années 2000. Après Paris 2024, le CIO lui a préféré le cabinet américain Deloitte, et ce dès les JO d’hiver de 2026 en Italie.
Atos pas totalement sorti du marécage
Atos aurait également perdu un appel d’offres pour doter l’Agence ministérielle pour l’IA de défense d’un supercalculateur dédié à l’intelligence artificielle. Le projet a été confié au tandem Hewlett-Packard et Orange. Signe de la fuite des clients, les prises de commandes ont dégringolé de plus de 30% au troisième trimestre, à 1,5 milliard d’euros de manque. L’entreprise n’est donc pas sortie des eaux troubles. Elle pourrait même céder de nouvelles activités et couper dans ses effectifs. Et si ce n’est pas suffisant, un nouveau plan de sauvegarde pourrait intervenir.