Loi immigration : un nouvel épisode de la bataille idéologique ?
Seulement un an après l’adoption d’un précédent texte, le gouvernement français prépare déjà une nouvelle loi immigration pour 2025. Ce projet suscite de vives réactions dans l’ensemble de la classe politique. Certains pensent qu’il s’agit d’une initiative pour contenter le RN de Marine Le Pen, avant l’adoption du budget.
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a révélé dimanche que le gouvernement envisage une nouvelle réforme sur l’immigration, un an seulement après l’adoption d’un précédent texte censuré en partie par le Conseil Constitutionnel. Parmi les mesures avancées dans cette nouvelle loi figure le relèvement, de 90 à 210 jours, de la durée maximale de rétention administrative des étrangers jugés dangereux. Cette peine s’applique aujourd’hui en matière d’infractions terroristes.
Michel Barnier se plie-t-il encore à Marine Le Pen avec une nouvelle loi immigration ?
La nouvelle loi propose aussi la création d’un délit de séjour illégal, la suppression de la circulaire Valls et ses régularisations ainsi que la transformation de l’aide médicale d’Etat en aide médicale d’urgence. « On ne s’interdit pas de réfléchir à d’autres dispositions », a précisé Bregeon, qui annonce que le texte serait examiné début 2025 au Parlement.
En proposant une nouvelle loi sur l’immigration, Michel Barnier voudrait en fait contenter le RN pour obtenir l’adoption de son budget. En effet, Marine Le Pen avait fait de l’absence de ce texte une « ligne rouge » qui pourrait déclencher une censure du gouvernement. L’exécutif y voit aussi un moyen de détourner l’attention pendant qu’il fait passer son budget en douce. Il ne faut pas pour autant oublier que Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur, incarne une ligne dure de la droite (LR). Il a toujours réclamé des mesures plus strictes sur la gestion des étrangers clandestins.
La précédente loi immigration dépécer par le Conseil constitutionnel
Ce nouveau projet de l’exécutif risque d’attiser encore plus les tensions, alors que la coalition gouvernementale cherche toujours une majorité stable à l’Assemblée nationale. L’ex-Premier ministre, Gabriel Attal, a estimé le lundi 14 octobre, sur France Inter, qu’une nouvelle loi sur l’immigration ne lui semblait « pas totalement prioritaire » en ce moment. Il a rappelé que la France « a adopté une loi il y a moins d’un an sur l’immigration, avec des mesures dont certaines ne sont pas encore en vigueur ». Il pense donc qu’il faut plutôt les mettre en œuvre, au lieu d’en créer de nouvelles.
Fin janvier 2024, une précédente loi sur l’immigration avait été promulguée par l’exécutif. Elle avait suscité des remous à l’Assemblée nationale, même au sein de la majorité présidentielle. Le Conseil constitutionnel avait retoqué de nombreuses dispositions de ce texte, notamment les quotas migratoires et le rétablissement du délit de séjour irrégulier.
A gauche, comme chez les Macronistes, on rejette une nouvelle loi immigration
Gabriel Attal ne voit donc pas l’intérêt de ramener certaines de ces mesures sur la table. Comme allonger la durée de rétention, ce que le gouvernement a déjà fait en passant de 45 à 90 jours. Pour l’ancien locataire de Matignon, « ce qui est prioritaire, c’est d’agir pour que l’Etat puisse véritablement maîtriser qui rentre et qui sort » du pays. A gauche aussi on ne comprend pas l’initiative de Barnier. Olivier Faure, leader du Parti socialiste, accuse le Premier ministre de céder à l’extrême droite. « Cette loi n’est qu’un gage à Marine Le Pen », a-t-il affirmé.
Jordan Bardella va regarder le texte de plus près
Les écologistes, eux, dénoncent une « accumulation législative » qui, ne résout aucun problème. La députée Cyrielle Chatelain rappelle que la France a adopté pas moins de 32 lois concernant l’immigration et les étrangers, depuis 1980. De son côté, le chef de file du RN, Jordan Bardella a prévenu qu’il allait « regarder concrètement » le contenu du futur texte. En d’autres mots, il s’assurera que la loi est assez bien corsée pour endiguer l’immigration, le thème favori du parti d’extrême droite.