Coronavirus : halte aux fausses polémiques
Alors que les personnels soignants se battent en première ligne contre le coronavirus, des entreprises comme LVMH tentent de pallier le manque criant de masques et de gels hydroalcooliques. L’heure n’est pas à la polémique, mais à l’effort commun contre la pandémie.
« Nous sommes en guerre » : contre cet ennemi invisible qu’est le Covid-19, Emmanuel Macron n’a pas eu de mots assez forts. La crise sanitaire que traverse le monde entier est, en effet, inédite par son ampleur, sa brutalité, son entièreté : esprits sidérés, économies bloquées, nations confinées. Elle appelle une réponse totale, sans équivoque, sans arrières-pensées. Si nous sommes bien en guerre, alors toute contribution à « l’effort de guerre » contre le coronavirus est la bienvenue, quelle qu’elle soit, d’où qu’elle vienne.
L’impréparation de l’hôpital public, conséquence de choix politiques court-termistes
En l’absence de traitement reconnu et dans l’attente d’un hypothétique vaccin, les seules armes contre le coronavirus résident dans l’application stricte des « gestes barrières » et du confinement de la population. Et, pour les personnels de santé, dans la mise à disposition, massive, de masques et de gels hydroalcooliques – à défaut desquels ces mêmes soignants seront contaminés et, de fait, dans l’incapacité d’exercer leurs missions. Or la France manque, cruellement, de ces deux produits: il faudrait 24 millions de masques FFP2 par semaine, selon le ministre de la Santé, Olivier Véran, et même 105 millions de masques selon plusieurs collectifs de médecins.
Problème : si la France disposait, en 2011, d’un milliard de masques chirurgicaux et de 600 millions de masques FFP2, elle ne détenait plus en stock, lorsque l’épidémie de Covid-19 a frappé à sa porte, que de 150 millions d’unités. Cette pénurie est de nature éminemment politique, les gouvernements successifs ayant jugé la gestion de ces stocks de masques inutile et trop onéreuse. En d’autres termes, le manque de masques dont souffrent aujourd’hui nos hôpitaux est le résultat de choix économiques court-termistes, privilégiant une logique purement financière et comptable à l’intérêt général.
LVMH au chevet des personnels hospitaliers
Conscient de la gravité de la situation, l’exécutif n’a pas tardé à réagir, Olivier Véran annonçant la commande de 250 millions de masques. Un effort nécessaire, mais pas suffisant. C’est pourquoi Bernard Arnault, le PDG du groupe LVMH, a annoncé le 21 mars que le numéro un mondial du luxe fournira, « grâce à l’efficacité de son réseau mondial », 10 millions de masques supplémentaires (7 millions de masques chirurgicaux et 3 millions de maques FFP2) au personnel hospitalier français. L’opération aura lieu quatre fois, mettant ainsi à disposition quelque 40 millions de masques.
Dès le 13 mars, le groupe présidé par M. Arnault s’était engagé à produire massivement du gel hydro-alcoolique pour les hôpitaux, en mobilisant ses sites de production français habituellement dédiés aux parfums et cosmétiques (Guerlain, Dior, Givenchy). L’idée paraît simple, les composants du gel hydro-alcoolique et des parfums et cosmétiques (alcool, eau purifiée, glycérine) étant en grande partie similaires ; encore fallait-il l’avoir, et la mettre en œuvre efficacement. Quelque 20 tonnes de gel sont ainsi sorties des usines du groupe LVMH pour approvisionner les établissements de l’AP-HP.
Une polémique infondée
Qu’un fleuron tel que LVMH mette ses capacités industrielles au service d’une cause aussi cruciale que la lutte contre le coronavirus ne devrait pas faire polémique. Sauf en France, précisément : de la France Insoumise à l’ONG Attac, les critiques se sont immédiatement abattues sur la générosité de Bernard Arnault. Avec un argument phare, le même qui avait été brandi quand le groupe de luxe avait, en mars dernier, proposé son soutien à la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris : si LVMH payait tous ses impôts en France, l’hôpital public se porterait mieux et n’aurait, in fine, pas besoin de recourir à la générosité de donateurs privés.
LVMH n’a pourtant pas à rougir de sa participation à la richesse nationale : sixième plus gros contributeur français, le groupe s’est ainsi acquitté, en 2017, de 2,4 milliards d’euros de prélèvements obligatoires, dont 770 millions de cotisations sociales. Par ailleurs, la moitié de ses impôts sont reversés en France, alors que LVMH n’y réalise que 10% de ses ventes. Les accusations d’optimisation fiscale proférées par les représentants d’Attac France apparaissent donc erronées et, surtout, démagogiques et déplacées en ces temps de crise. Si l’hôpital public rencontre des difficultés, celles-ci sont bien davantage liées aux conséquences de choix politiques funestes qu’aux pratiques fiscales d’entreprises tentant, précisément, d’apporter tout leur soutien aux soignants français.