La blockchain : futur maillon fort de l’entreprise ?
Née en 2008 avec l’apparition du bitcoin, la technologie blockchain fait de plus en plus parler d’elle dans les médias. Malgré un fonctionnement encore abstrait pour une partie du grand public, elle suscite un fort intérêt de la part des entreprises, qui voit en elle un certain potentiel de développement.
Connu pour sa volatilité sans égal dans l’univers de la bourse, le bitcoin est étroitement lié à la technologie blockchain, créée par le même fondateur japonais opérant sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto. Mais contrairement à la monnaie virtuelle, qui est actuellement en chute libre, la blockchain connaît un essor ininterrompu ces dernières années, même si son fonctionnement demeure relativement méconnu du grand public. Cette technologie de stockage et de transmission d’informations tient justement sa popularité croissante à son modèle transparent et sécurisé, qui ne dépend d’aucun organe de contrôle, hormis sa propre communauté, d’après l’organisme Blockchain France. Publique ou privée, la blockchain permet en effet à chacun de ses utilisateurs de consulter l’historique de l’ensemble des échanges effectués depuis sa création. Chaque interaction est rendue possible par l’utilisation d’une monnaie ou d’un jeton (« token » en anglais) programmable et vérifiée par les « mineurs », sortes de maillons du réseau en question. Une fois l’information transmise, elle est enregistrée et ajoutée à la chaîne visible de tous. L’utilisation la plus connue de cette technologie révolutionnaire concerne le transfert d’actifs comme les monnaies virtuelles (ou crypto-monnaies), à l’image du bitcoin et de l’ethereum, mais aussi de titres bancaires, d’actions, d’obligations voire même de votes. De nombreuses autres applications existent pour assurer la traçabilité de produits ou d’actifs (« registre »), ou encore pour exécuter automatiquement les conditions et termes d’un contrat (« smart contrats »). Elles recèlent un potentiel immense pour les entreprises de secteurs variés : les banques et assurances bien sûr, mais aussi la santé, l’industrie pharmaceutique, l’agroalimentaire, l’immobilier, l’énergie, les transports, etc.
La blockchain déjà adoptée par 84 % de dirigeants
Selon les résultats d’une enquête publiée par le cabinet Deloitte, en 2019, 53% des dirigeants de grandes entreprises et des décideurs IT identifient la blockchain comme une des cinq priorités de leur organisation. Des résultats qui font écho à une enquête réalisée en 2018 par le cabinet PwC dans 15 pays dont la France. Près de 84 % des 600 cadres-dirigeants interrogés affirmaient avoir déjà engagé des initiatives impliquant la blockchain. Parmi eux, 15 % déclaraient déjà disposer d’un projet opérationnel ; 10 % d’un pilote ; 32 % étaient en cours de développement ; et 20 % au stade de la recherche. La proportion restante ayant soit mis son projet sur pause, soit (encore) aucune initiative de blockchain. Preuve de l’intérêt des entreprises pour cette technologie, une autre étude a estimé les investissements dans la blockchain à 1,5 milliard de dollars dans le monde en 2018 et à 11,7 milliards d’ici 2022. Selon le cabinet Gartner, sa valeur ajoutée devrait atteindre 3 000 milliards de dollars à l’horizon 2030, échéance à laquelle 10 à 20 % des infrastructures économiques mondiales s’appuieront sur des systèmes basés sur cette technologie. Pour les entreprises, les atouts de la blockchain sont multiples, à commencer par la suppression de certains intermédiaires comme les banques, qui contribuent à réduire les coûts et donc à augmenter les marges. Outre la sécurisation des transactions financières, la blockchain permet également d’obtenir des délais plus courts grâce aux circuits de transactions plus directs, d’authentifier ses documents officiels ou encore d’archiver ses propres informations. Ces possibilités expliquent l’engouement des sociétés de plus en plus nombreuses à investir dans des solutions faisant appel à la blockchain.
Les grands groupes français à bloc sur la blockchain
En France, EDF a lancé dès novembre 2017 un dispositif de certification de ses communiqués de presse sur son site dédié (medias.edf.com) qui permet de garantir l’authenticité de leur contenu grâce à une signature électronique unique et infalsifiable. Pour le mettre en place, l’énergéticien s’est associé à la start-up française KeeX. Comme lui, d’autres grands groupes comme Kodak, Carrefour ou encore AXA se sont emparés de la technologie blockchain. L’assureur a ainsi lancé sa plateforme (Fizzy) d’indemnisation automatique pour ses clients victimes de retards ou d’annulations d’avions, tandis que le spécialiste de la photo a annoncé vouloir développer sa propre cryptomonnaie : le KodakCoin. Quant à l’enseigne de grande distribution – qui a inauguré l’an dernier une première plateforme pour assurer le suivi et la traçabilité de ses produits de volaille – elle vient d’annoncer la traçabilité de son camembert via la blockchain. La liste des grosses boîtes françaises à avoir intégré cette technologie dans leur stratégie continue de s’allonger : Crédit Mutuel, BNP Paribas, Microsoft, Renault, Peugeot, etc. Si les grandes entreprises s’intéressent tant à la blockchain, c’est parce qu’elles auraient pris conscience qu’il ne faut pas rater le coche, ni prendre du retard. Et ne pas reproduire les erreurs commises dans le passé, comme par exemple lors de l’avènement d’internet, puis des réseaux sociaux, auxquels toutes les sociétés n’ont pas cru immédiatement. « Au sein d’EDF, nous constituons des équipes dédiées qui préparent l’avenir en travaillant sur les technologies telles que l’intelligence artificielle, la blockchain, ou l’internet des objets, illustre Véronique Lacour, Directeur Exécutive Groupe Transformation et Efficacité Opérationnelle chez EDF. Nos équipes travaillent très en amont sur ces nouvelles technologies pour former des centres de compétences au service des métiers qui constituent de véritables accélérateurs. En mettant à disposition des métiers à la fois des technologies et des compétences pointues, elles leur permettent d’apporter toujours plus de service et toujours plus d’innovation pour nos clients et pour nos salariés. »