Conversion de l’uranium : un marché en plein renouvellement

Conversion de l’uranium : un marché en plein renouvellement

Alors que la place du nucléaire fait débat en France et dans certains pays étrangers, l’atome n’en reste pas moins un secteur économique en pleine expansion. La Chine entend augmenter ses capacités et si des pays comme la France ont tendance à réduire petit à petit la voilure, les besoins en matière d’enrichissement et de conversion n’ont jamais été aussi forts. C’est dans ce contexte qu’Orano vient d’inaugurer une nouvelle usine de conversion qui peut assurer jusqu’à 25 % de la demande mondiale.

 Il souffle sur l’énergie atomique des vents contraires et contradictoires. Le Japon se cherche un nouveau modèle énergétique après Fukushima et l’Allemagne a décidé de fermer brutalement ses centrales avec les conséquences en matière de pollution que l’on connaît. En France, le débat est âpre au sujet de notre futur nucléaire. Combien de réacteurs sont appelés à fonctionner ? Combien de centrales à démanteler ? Combien d’EPR à mettre en chantier ? Les réponses varient grandement selon les acteurs, mais le gouvernement français continue d’accorder sa « confiance » en la filière via la recapitalisation du groupe Areva à hauteur de 4,5 milliards d’euros en 2017, dont 2,5 milliards d’euros pour Orano. Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances a d’ailleurs souligné le 10 septembre 2018 que la France n’a pas « fait le choix d’une sortie brutale du nucléaire » et qu’il fallait être « fiers des compétences de la filière nucléaire » pour accompagner la montée en puissance des énergies renouvelables encouragée par les pouvoirs publics.

L’indispensable conversion de l’uranium

Cette déclaration rappelle que la filière nucléaire est bien plus importante que la construction et l’exploitation de centrales. Pour produire de l’énergie, un difficile processus de transformation est nécessaire. Cela passe en premier lieu par ce qu’on appelle la conversion de l’uranium. Malheureusement, l’uranium exploité dans les mines du Niger, de Namibie ou du Kazakhstan ne peut pas être utilisé tel quel dans les centrales. Ce minerai doit être soumis à un processus de purification de l’uranium. L’uranium est ainsi transformé en hexafluorure d’uranium (UF6) avant l’opération (plus connue du grand public) qu’est l’enrichissement. Un processus long et extrêmement technique qui n’est maîtrisé que par quelques entreprises dans le monde. La France peut s’enorgueillir d’une parfaite maîtrise en la matière grâce à la société Orano (ex-Areva) qui a inauguré, ce 10 septembre dernier, une nouvelle usine de conversion d’uranium.

Située à Tricastin (Drôme), le projet Comurhex II dont l’usine d’enrichissement a été baptisée Philippe Coste – du nom de l’un des pionniers français du nucléaire – aura coûté 850 millions d’euros auxquels il faut ajouter 300 millions d’euros pour la rénovation du site de Malvési (Aude). Un investissement conséquent qui n’a pas été décidé à la légère puisqu’il en va de l’avenir du nucléaire français. Une fois la mise en service industrielle (prévue fin 2018), l’usine qui remplace Comurhex I (située sur le même site et fermée en décembre 2017) aura une capacité de 7 500 tonnes par an. A partir de 2021, l’installation pourra tourner à plein régime à raison de 15 000 tonnes chaque année. Cela équivaut à la fourniture d’électricité bas carbone de plus de 90 millions de foyers, soit la France, l’Angleterre et l’Allemagne réunis.

Une filière nucléaire pleine d’avenir

Antoine Troesch, directeur de l’activité chimie et enrichissement chez Orano souligne que ce sont des investissements « Made in France » qui ont « permis notamment d’associer plus de 240 entreprises partenaires, à 99 % françaises, dans la réalisation de ce projet ». Une performance française remarquable qui mobilise « un bassin local d’emplois extrêmement qualifié ». La capacité à maîtriser parfaitement l’ensemble du « cycle du combustible est un atout clé de la filière nucléaire française » selon Delphine Gény-Stephann, présente lors de l’inauguration de l’usine Philippe Coste. Un savoir-faire qui profite à EDF pour la France, et à une quarantaine de clients à travers le monde. A peine sortie de terre, la nouvelle usine peut déjà compter sur un carnet de commandes rempli pour les dix prochaines années.

Philippe Knoche, directeur général d’Orano se montre confiant avec des clients étrangers rassurés par l’expertise d’un groupe qui mise sur la sûreté et la sécurité. Car si le budget total atteint 1 150 milliard d’euros, c’est en grande partie en raison du renforcement de la sûreté et de la sécurité dans un contexte post-Fukushima. A titre d’exemple, le bâtiment principal est compartimenté en 200 salles et toutes les structures ont été conçues pour résister à des Séismes majorés de sécurité (SMS). Un coût également dû aux efforts pour rendre le processus moins gourmand en énergie. Ainsi, la consommation d’eau nécessaire a diminué de 90 % tandis que le recours à des réactifs chimiques a baissé jusqu’à 75 %.

Avec l’unique usine de conversion de l’uranium en Europe, Orano entend rester le leader mondial dans ce domaine malgré l’appétit de la Chine. Un pays partenaire, mais néanmoins concurrent qui mise autant sur les énergies renouvelables que sur le nucléaire. Un marché dont les prix ont doublé au cours de ces derniers mois, ce qui confirme la stratégie française de maîtriser l’ensemble de la chaîne du combustible. Une maîtrise qui évite une dépendance étrangère et qui se révèle profitable en termes de retombées économiques.

 

La Rédaction

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