Enjeux et changements à suivre dans le bâtiment en 2018
Quels changements attendre en 2018 dans le bâtiment ? Production « décarbonée », partenariat entre EDF et le CSTB, diagnostic énergétique, aides publiques… De nombreux changements sont à attendre, alors que le gouvernement multiplie les efforts pour faire face à l’urgence des enjeux climatiques.
Dans le bâtiment, sortir des énergies fossiles
Le financement des énergies est au cœur des enjeux de développement durable. Aussi, il s’agit du point de focalisation principal de l’action publique : il est nécessaire de soutenir la transition énergétique des territoires afin d’avancer vers une économie bas carbone et honorer les engagements internationaux de réduction des émissions du pays (COP21, One Summit Planet). Mais cette transition requiert également de cesser de financer les énergies du passé afin de ne plus inciter à leur utilisation. Non seulement, l’empreinte écologique des énergies fossiles est très importante, mais les réserves devraient se tarir d’ici à 60 ans pour le pétrole et 70 ans pour le gaz.
En outre, l’Agence Internationale de l’Energie estime que la demande énergétique mondiale pourrait augmenter de plus de 50 % d’ici 2030. Cela accélérerait la raréfaction des combustibles fossiles sur Terre mais également les émissions, si les modes de production alternatifs ne sont pas développés assez rapidement.
Dans une tribune publiée le 7 décembre 2017, le collectif Pas un euro de plus pour les énergies du passé, qui regroupe des personnalités du monde économique, scientifique et politique, a appelé à un « pacte finance-climat européen », qui inclut un « vrai budget » pour la recherche (stockage de l’énergie, transports…). Dans le collimateur de leur coalition, le bâtiment – grand laissé pour compte des financements en faveur du climat, il affiche le plus gros potentiel d’économies d’énergie. Et ce, alors que le bâti français est responsable à hauteur de 44% dans la consommation énergétique finale du pays (68,7 MTep en 2012).
Vers une révision de la RT2012 en 2018 ?
En améliorant l’isolation, l’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables, la France pourrait se passer des énergies fossiles sans augmenter de façon significative la demande d’électricité. Cela permettrait, en outre, de réduire les émissions de CO2 de 90 millions de tonnes, soit un huitième des émissions annuelles de la France.
C’est la raison pour laquelle, Etat a lancé la Réglementation thermique 2012 (RT 2012), qui impose aux entreprises du BTP à construire des bâtiments mieux isolés et moins gourmands en énergie. Toutefois, cette réglementation s’appuie sur une approximation du Réseau de transport d’électricité, qui a estimé qui l’électricité (énergie secondaire) était plus émettrice de CO2 que les énergies fossiles (un coefficient de 2,58 pour l’électricité, contre seulement 1 pour les énergies primaires). Ce calcul pénalise considérablement le choix de l’électrique, alors qu’il est nettement moins émetteur : 1 kWh électrique issu du nucléaire produit 6 g d’équivalent CO2 contre 883 g pour le gaz naturel, 891 g pour le fuel et 978 g pour le charbon.
En décembre dernier, le ministère de la Transition écologique et solidaire a décidé de maintenir l’exigence à 57,5 kWh/m².an pour les bâtiments collectifs d’habitation jusqu’en 2019. Une marche arrière critiquée au motif que 70% des logements collectifs autorisés en 2012 consommaient déjà moins de 50 kWh/m2.an. Une révision de la RT ne semble toujours pas envisagée. A défaut, ne faudrait-il pas instaurer une contrainte carbone dans le texte d’application pour corriger ce mauvais calibrage ?
Mise en place du partenariat entre EDF et le CSTB consacré à l’énergie dans la construction
L’amélioration de la performance énergétique des bâtiments, rénovés ou neufs, impose le développement et le déploiement de nouvelles technologies. Dans cette optique, le groupe EDF et le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) se sont accordés sur partenariat de recherche, le 13 décembre 2017. Ils se sont ainsi engagés à « collaborer en 2018 pour faire progresser les connaissances, les méthodes et les outils » et « optimiser les différents usages de l’énergie, leurs interactions ainsi que leur pilotage ». Le groupe EDF a développé une expertise (via sa direction R&D) dans l’optimisation énergétique des bâtiments. A ce titre, il vient épauler le CSTB.
Cette collaboration suit quatre axes principaux : l’évaluation des bâtiments performants ; l’empreinte environnementale du territoire ; le Building Information Modeling (ou « Modélisation des Informations du Bâtiment », qui permet de un partage d’informations fiables tout au long de la durée de vie d’un bâtiment) et l’accompagnement de l’innovation dans la filière bâtiment.
« L’amélioration des performances énergétiques et le développement des usages bas carbone dans les bâtiments est un enjeu fort pour la R&D du groupe EDF et à ce titre, nous sommes heureux de pouvoir collaborer avec le CSTB dont les connaissances scientifiques et techniques seront complémentaires à notre expertise pour accompagner l’innovation dans ce secteur », explique Bernard Salha, directeur de la R&D d’EDF.
Le diagnostic énergétique devient obligatoire en 2018
Autre nouveauté, à compter du 1er janvier 2018, le diagnostic énergétique est obligatoire en France pour tous les logements de plus de quinze ans mis en location. Ce dernier concerne les installations de gaz et d’électricité et engage la responsabilité du propriétaire (une incitation de taille). Il répond à un double objectif : limiter les risques liés à des installations vétustes et augmenter la performance énergétique des logements anciens.
Pour les installations électriques, le diagnostic énergétique vérifie la présence d’un appareil général de commande et de protection ainsi que son accessibilité, d’au moins un dispositif différentiel de sensibilité et de protection contre les surintensités, d’une installation électrique adaptée aux conditions particulières des locaux contenant une baignoire ou une douche. Le diagnostic vérifie également l’absence de matériels électriques inadaptés à l’usage ou présentant des risques de contacts directs avec des éléments sous tension et que les conducteurs non protégés mécaniquement.
Pour les installations de gaz, le diagnostic énergétique porte lui sur l’état des appareils fixes de chauffage, de production d’eau chaude sanitaire ou mettant en œuvre un moteur thermique, alimentés par le gaz ; l’état des tuyauteries fixes d’alimentation en gaz et leurs accessoires ou encore l’aménagement des locaux où fonctionnent les appareils à gaz, permettant l’aération de ces locaux et l’évacuation des produits de combustion.
Aides pour la rénovation énergétique
Fruit de la collaboration entre le gouvernement et l’Ademe, les aides financières à la rénovation énergétique visent à inciter les ménages les plus fragiles économiquement à entreprendre des travaux d’optimisation de leur logement. En 2018, les nouveautés sont :
- Un recentrement du crédit d’impôt transition énergétique
Le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) concerne les propriétaire, locataires et occupants à titre gratuit de deux ans et plus. Ils peuvent déduire de l’impôt sur le revenu, 30% des dépenses (montant plafonné) pour les travaux d’amélioration de la performance énergétique ou l’acquisition d’équipements permettant des économies d’énergie (chaudières à condensation, appareils de régulation du chauffage, etc.). Nouveauté 2018, les consommateurs achetant une nouvelle chaudière au fioul (même plus performante) ne pourront plus bénéficier du CITE.
- La TVA à taux réduit pour les portes et fenêtres
L’Etat a reconduit la réduction de 10% du taux de TVA sur l’achat de portes et de fenêtres – exclues du CITE. La réduction vise également les frais de main d’œuvre relatifs à la pose des portes et des fenêtres (amélioration, transformation, aménagement et entretien) réalisés dans des logements achevés depuis plus de deux ans.
- Une nouvelle prime pour le changement de chaudière
Une prime supplémentaire de 2 000 euros est prévue pour les ménages modestes s’équipant d’une chaudière à biomasse. Elle atteint même 3 000 euros pour les ménages très modestes (un foyer sur quatre). Cette prime s’applique également l’achat d’une chaudière à gaz plus performante dans une fourchette de 200 à 450 euros, selon les revenus.
- Le maintien du l’éco-prêt à taux zéro
L’éco-prêt à taux zéro, qui devait disparaitre le 31 décembre 2018, sera finalement maintenu au-delà de cette date. Il permet d’obtenir un prêt à taux d’intérêt nul et accessible sans condition de ressources, pour financer un ensemble cohérent de travaux d’amélioration de la performance énergétique pour les logements principaux achevés avant le 1er janvier 1990.
- L’augmentation des moyens pour la programme d’aides de l’Agence nationale de l’habitat (Anah)
Dans le cadre du programme « Habiter mieux », l’Anah doit bénéficier de « nouveaux moyens » en 2018 afin de poursuivre l’accompagnement des ménages modestes (l’augmentation de moyens n’a pas encore été chiffrée par le gouvernement). Elle accompagne les ménages modestes dans des travaux qui permettent de diminuer de façon significative les déperditions d’énergie du logement.
Mise en place du chèque énergie pour les plus démunis
Le chèque énergie est venu remplacer les tarifs sociaux de l’énergie – un mécanisme panélisé par ses lourdeurs administratives. Il s’agit d’un titre de paiement attribué aux précaires pour une couverture complète des besoins énergétiques des foyers consommateurs de gaz et d’électricité. Il couvre aussi les travaux de rénovation permettant la réduction de la consommation d’énergie. Cette aide est distribuée automatiquement par un organisme dédié, l’Agence de services et de paiement. Les 4 millions de ménages qui consacrent aujourd’hui plus de 10% de leur budget à payer leur facture d’énergie le recevront au fil de l’année. Son montant peut varier entre 48€ et 227€.