La refonte du nucléaire français : une bonne nouvelle pour l’économie ?
Le 27 janvier, le conseil d’administration d’EDF a scellé l’accord qui lui permet de reprendre Areva NP, la branche Réacteurs et Services du groupe nucléaire. Plus qu’un simple plan de sauvetage d’Areva, en proie à de sérieuses difficultés financières, cette refonte du nucléaire national pourrait impacter positivement l’ensemble de l’économie française.
Il faut sauver le solde d’Areva
Après des mois de négociations, la cession de l’activité de construction et de maintenance des réacteurs d’Areva a finalement été actée il y a quelques jours lors d’un conseil d’administration d’EDF, pour une offre dont le montant s’élève à 2,5 milliards d’euros. Un prix d’achat qui pourrait cependant être revu à la hausse et se voir gonfler de quelques 350 millions d’euros si les résultats des activités de la branche acquise se montrent conformes aux attentes.
Décidée l’été dernier par le gouvernement, cette réorganisation du nucléaire français doit donner les moyens à Areva de redresser la barre et de sortir d’une crise financière qui ne cesse de s’aggraver. Au bord de la faillite, avec des comptes perpétuellement déficitaires, le groupe nucléaire n’a pas réussi à gérer l’après Fukushima, le scandale UraMin ou encore des chantiers catastrophes, comme celui de la construction de l’EPR d’Olkiluoto (OL3) en Finlande qui accuse déjà 9 ans de retard pour un dépassement de budget de 5 milliards d’euros.
Les besoins en financement d’Areva sont donc importants, de l’ordre de 7 milliards d’euros pour les 3 prochaines années selon les dirigeants du groupe. Désormais recentrée essentiellement dans l’extraction minière et le retraitement des déchets, le nouvel Areva doit éponger ses dettes et faire face à de nouvelles dépenses pour continuer de financer les projets en cours, notamment celles engendrées par la création du centre Cigéo. Le coût de ce projet de stockage souterrain des déchets hautement radioactifs, que doivent supporter EDF, le CEA et Areva, ne cesse d’être réévalué à la hausse (34,5 milliards d’euros selon les dernières estimations).
Si le plan de sauvetage du gouvernement repose principalement sur la vente de la branche Réacteurs d’Areva, une activité qui représente la moitié du chiffre d’affaires globale du groupe, l’État entend également mettre la main à la poche et a accepté de procéder à une recapitalisation du groupe, avec une augmentation de capital de 5 milliards d’euros. Couplée à un plan d’économies d’1 milliard d’euros, cette enveloppe devrait permettre à l’ingénieriste nucléaire de poursuivre son activité sur des bases plus beaucoup solides.
Stabiliser et redynamiser la filière nucléaire française
Le rachat d’Areva NP par EDF marque la troisième organisation de la filière nucléaire en France. Pour Emmanuel Macron, cette refonte du secteur est un moyen de « donner une stabilité à la filiale nucléaire », aussi bien sur le plan national qu’international.
En préservant de la faillite l’un des acteurs majeurs du nucléaire en France, le gouvernement et EDF entendent renforcer la filière et lui insuffler à nouveau une vitalité qui devrait avoir un effet dopant sur les exportations. Premier électricien en France et dans le monde, EDF jouit désormais d’un savoir faire complet qui attire les pays désireux de s’engager dans un programme nucléaire civil.
Bien que sceptiques quant à la réussite de cette nouvelle organisation du nucléaire hexagonal, les députés Marc Goua (PS) et Hervé Mariton (LR) consentaient néanmoins il y a quelques mois que l’offre proposée aujourd’hui par EDF n’a pas réellement son pareille sur le marché du nucléaire mondial. Selon eux, les compétences du groupe vont être plébiscitées par un nombre croissant de pays qui « recherchent davantage une offre globale incluant expérience d’exploitation et de construction. »
Le nucléaire reste aujourd’hui l’un des secteurs les plus porteurs pour l’économie française. Il représente à lui seul 410 000 emplois (directs et indirects confondus), soit 2 % de l’emploi national. Cette réorganisation doit permettre à la filière de retrouver un équilibre nécessaire au maintien de l’activité et à sa bonne santé. Préserver ce bastion de l’économie française et l’optimiser sont des moyens pour la France de garantir des contrats et des retombées financières importantes, dans l’Hexagone et à l’étranger. En temps de crise, cela reste une opportunité non négligeable.